La visite du secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, en Haïti, le 5 septembre 2024, s’inscrit dans une tradition bien rodée de soutien international affiché, mais dont les résultats concrets peinent à convaincre. Alors qu’il saluait des « étapes très importantes » et des « progrès réels » réalisés par les forces internationales et la police haïtienne, la réalité sur le terrain raconte une tout autre histoire.
Depuis plus d’un mois, Haïti semble figé dans une impasse. Les tensions politiques et sociales ne se sont guère apaisées, et le quotidien des Haïtiens demeure marqué par l’insécurité et l’incertitude. Les mots du diplomate américain, aussi encourageants soient-ils, ne suffisent pas à masquer le manque de changement tangible.
La question des élections, évoquée avec insistance par le secrétaire d’État, est certes importante. Mais comment envisager un processus électoral crédible dans un pays où le pouvoir exécutif lui-même est discrédité par un scandale de corruption touchant trois membres du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) ? Ce scandale a figé la situation politique, empêchant toute avancée significative. La « bête à plusieurs pattes », comme l’a surnommée un observateur, semble incapable de se mouvoir, prise dans les rets d’une corruption systémique.
Dans ce contexte, parler de progrès est pour le moins prématuré. Les efforts internationaux, si louables soient-ils, risquent de s’enliser si une refonte profonde des institutions haïtiennes n’est pas entreprise. La communauté internationale doit prendre conscience qu’elle ne peut se contenter de soutenir en surface sans traiter les racines profondes du mal qui ronge Haïti.
L’urgence est là, certes, mais elle doit s’accompagner de lucidité. Tant que la corruption et l’impunité règnent, aucune élection ne pourra véritablement redonner espoir à une population lassée de promesses non tenues. Haïti mérite mieux qu’une illusion de progrès. Elle mérite un engagement sincère et des réformes profondes pour sortir de cette crise endémique.
